Quel est l’impact du divorce sur la succession des ex-conjoints ?

Divorce et succession

Les ex-époux divorcés gardent-ils des droits sur la succession l’un de l’autre ? Que se passe-t-il si un des époux décède pendant la procédure de divorce ? Qu’en est-il de la séparation ?

Chaque année, plus de 120 000 couples mariés divorcent. Lorsque le divorce est prononcé, chacun des ex-conjoints récupère ses biens propres et sa part des biens communs du couple ou des biens en indivision. Mais que se passe-t-il si l’un des deux décède ? Pour répondre à cette question, MaSuccession.fr passe en revue les droits des conjoints et des ex-conjoints.

Régime matrimonial et droit successoral des époux

Les époux mariés ont des droits sur le patrimoine du couple en vertu de leur régime matrimonial. Par exemple, si Marie est mariée à Jean sous le régime légal de la communauté réduite aux acquêts, elle est propriétaire de ses biens propres et de la moitié des biens communs au couple. En cas de décès de Jean, Marie récupère sa part avant la succession. La part de Jean (ses biens propres plus l’autre moitié des biens communs) rentre dans son actif successoral, son héritage qui sera partagé entre ses héritiers.

Les conjoints ont également des droits successoraux. La loi dite de dévolution légale accorde par défaut une part de l’héritage du conjoint décédé au conjoint survivant, quel que soit son régime matrimonial. Cette part varie selon le nombre et la nature des autres héritiers : enfants ou parents et frères et sœurs. En l’absence d’enfants, le conjoint à droit à une part réservataire (obligatoire) d’un quart de l’héritage du conjoint décédé.

Le droit des successions donne également au conjoint survivant des droits sur le logement familial.

Le divorce annule les dispositions du contrat de mariage

Le divorce dissout le mariage. Les biens du couple sont partagés selon les règles de leur régime matrimonial[i] et du contrat de mariage. Par exemple, si Marie et Jean étaient mariés sous le régime de la communauté légale, chacun reprend ses biens propres et leur communauté de biens est partagée entre eux à parts égales.

Le divorce annule également automatiquement les clauses additionnelles au contrat de mariage qui augmentent la part d’héritage du conjoint survivant au déces, au-delà de sa part légale par défaut (pour plus d’information sur ces dispositions, cliquez sur les liens) :

Les ex-conjoints ne sont plus héritiers légaux l’un de l’autre

Pour la succession, les ex-conjoints divorcés deviennent des étrangers l’un à l’autre. Ils n’ont plus droit à aucune part de leurs héritages réciproques. Les droits liés au logement familial sont également supprimés.

Les enfants du couple, en revanche, conservent leurs droits sur l’héritage de leurs parents.

Attention : certaines dispositions ne sont pas automatiquement annulées

Les dispositions testamentaires, les donations, les clauses bénéficiaires des contrats d’assurance décès ou d’assurance vie ne sont pas automatiquement annulées.

  • Un bien donné de son vivant par un conjoint à l’autre sous forme de donation simple ne peut être repris après le divorce en vertu de l’irrévocabilité des donations.
  • Une donation entre époux (donation au dernier vivant, donation des bien futurs à distinguer de la donation simple) consentie hors contrat de mariage est révocable par un conjoint sans l’avis de l’autre,
  • Un legs testamentaire en faveur d’un ex-conjoint désigné par son nom, et non par sa qualité de conjoint, reste valide tant que l’auteur du testament ne le change pas.
  • Une clause bénéficiaire d’un contrat d’assurance vie rédigée en faveur de « Mon conjoint » ne pourra s’appliquer à l’ex-conjoint. En revanche, si elle désigne précisément l’ex-époux par son nom, elle restera applicable. De plus, si la clause bénéficiaire a été acceptée par le conjoint bénéficiaire, elle ne peut pas être changée sans son accord.
  • Chaque caisse de retraite a ses propres règles concernant les droits des ex-conjoints divorcés à la pension de réversion.

Il est donc important que chaque ex-conjoint actualise ses dispositions testamentaires et ses contrats d’assurance pour vérifier qu’ils correspondent encore à sa volonté et à sa nouvelle situation.

Les conjoints séparés ou en instance de divorce restent héritiers l’un de l’autre

Les conjoints qui vivent en séparation de corps ou sont en instance de divorce sont légalement toujours mariés. Ils conservent donc leurs droits matrimoniaux et successoraux jusqu’au moment du divorce définitif. Le divorce est dit « définitif » quand le jugement prononcé par le juge aux Affaires familiales n’est plus susceptible de recours.[ii]  Lorsque le divorce n’est pas un divorce par consentement mutuel mais un divorce conflictuel, la procédure peut durer des années.

Il faut donc malheureusement prendre en considération la possibilité d’un décès pendant cette période. Dans ce cas, le divorce est annulé. La succession se déroule selon les règles des couples mariés. Le conjoint survivant est considéré comme veuf ou veuve.

Les conjoints peuvent réduire la part d’héritage de l’autre au minimum

Un conjoint séparé de corps ou en instance de divorce peut vouloir limiter au maximum le patrimoine laissé au conjoint survivant en cas de décès avant le divorce.

Etant encore officiellement marié, ce conjoint ne pourra pas modifier son régime matrimonial ou les clauses de son contrat de mariage sans l’accord de l’autre conjoint. Ainsi Jean, marié à Marie sous le régime de la communauté légale ne pourra empêcher que celle-ci reçoivent la moitié des biens commun s’il venait à décéder pendant leur séparation de corps ou la procédure de divorce.

Par contre, Jean peut, par testament, réduire la part de Marie dans sa succession au minimum légal.

  • En l’absence d’enfants, Jean peut par testament réduire la part de Marie dans sa succession à la part réservataire d’un quart de l’actif successoral.
  • En présence d’enfants, Jean peut complètement déshériter Marie.

Jean peut également changer les clauses bénéficiaires de contrats d’assurance et autres dispositions qui sont modifiables sans l’accord du conjoint. Ainsi, une clause bénéficiaire d’assurance vie trop vague pourra être remplacée par : « Mon conjoint, non divorcé, ni séparé de corps, ni en instance en divorce… »

Conclusion

En cas de décès d’un ex-conjoint, une personne divorcée n’a plus aucun des droits sur le patrimoine et sur la succession de cet ex-conjoint qui lui venaient du mariage.

En revanche, tant que le divorce n’est pas définitif, les conjoints séparés ou en instance de divorce conservent ces droits. Durant cette période de transition, ils peuvent prendre des mesures pour limiter la part d’héritage de l’autre. Plus généralement, ils peuvent mettre à jour toutes les dispositions en faveur du conjoint modifiables sans son accord.

 

[i] Les personnes mariées sans contrat sont mariées par défaut sous le régime légal de la communauté réduite aux acquêts dont les règles leur servent de contrat.

[ii] Tels qu’un recours en appel, recours en révision ou pourvoi en cassation.