Quel est l’impact du régime matrimonial dans les successions entre époux ?

Le régime matrimonial d'un couple

Lors d’une succession entre époux, le régime matrimonial a un fort impact sur l’actif successoral, c’est-à-dire sur le patrimoine des biens mobiliers et immobiliers qui seront inclus dans la succession. En effet, dans les régimes matrimoniaux instituant une communauté de biens, et en l’absence d’autres dispositions, les biens communs du couple sont divisés en deux et le conjoint survivant reçoit sa moitié avant le traitement de la succession. Les règles de dévolution successorale déterminent ensuite les règles de partage de l’actif successoral entre le conjoint survivant et les autres ayants droit, en particulier les enfants du défunt, ou ses parents, ou, dans une moindre mesure, ses frères et sœurs.

On précise « en l’absence d’autres dispositions » car le régime matrimonial peur être aménagé par des dispositions spéciales prises par testament, donation ou clause additionnelle au contrat de mariage.  Le conseil patrimonial s’avérera généralement nécessaire pour prendre de telles dispositions.

Comment le régime matrimonial distingue-t-il les biens communs des biens propres ?

Le régime matrimonial est le contrat qui lie les époux joints par mariage. Il définit, entre autres, leurs obligations financières l’un envers l’autre et envers des tiers. Point crucial pour la succession : il sépare les biens propres de chaque conjoint des biens communs qui appartiennent conjointement aux deux époux.

Il existe deux principaux types de régime matrimonial. Les régimes instituant une communauté de biens :

  • La communauté réduite aux acquêts : Dans ce régime, seuls les revenus gagnés et les biens achetés après le mariage sont considérés comme des biens communs. Les époux conservent en biens propres les biens acquis avant le mariage, ainsi que les bien reçus après le mariage par donation ou succession. Notez que toute l’épargne constituée pendant le mariage, y compris les assurances vie, est considérée comme faisant partie des biens communs du couple.
  • La communauté universelle : L’ensemble des biens acquis ou reçus, avant ou après le mariage par les conjoints est considéré comme constituant des biens communs. Ce régime fait obligatoirement l’objet d’un contrat.

Les régimes dits « séparatistes », qui n’instituent pas de communauté de biens :

  • La séparation de biens: Chacun des conjoints conserve en biens propres les revenus gagnés et les biens achetés avant et après le mariage. Il n’y a pas de biens communs au couple, mais seulement des biens en indivision qui appartiennent à chacun en proportion de sa contribution à l’achat, contrat ou facture à l’appui.[i] Ce régime fait obligatoirement l’objet d’un contrat.
  • La participation aux acquêts : Dans cette version, assez rare en France, du régime de la séparation des biens, l’éventuel enrichissement des conjoints pendant le mariage est partagé à la dissolution du mariage ou au décès. Nous ne développons pas ce point ici.

Le régime de la communauté réduite aux acquêts est également le « régime légal »[ii] car c’est le régime qui s’applique par défaut, en l’absence de contrat de mariage.

Quelles sont les conséquences pour la succession de la distinction entre biens communs et biens propres ?

Lors de la succession par suite du décès d’un des conjoints, l’actif successoral du défunt comprendra :

  • La moitié des biens communs du couple.
  • Les biens propres du défunt.
  • La part du défunt dans les biens détenus en indivision.

En résumé :

  Actif successoral du conjoint défunt
en l’absence d’autres dispositions que le régime matrimonial
  Biens communs du couple Biens propres du défunt Biens en indivision
Communauté universelle Moitié
Communauté réduite aux acquêts Moitié Tout  
Séparation de bien Tout En proportion de la contribution du défunt

 

Des exemples illustrent les différences importantes qui résultent des différents régimes :

Une maison héritée avant mariage.

Colette avait hérité d’une maison de ses parents avant son mariage. Colette décède, laissant Jean, son conjoint survivant. Selon le régime matrimonial du couple :

  • Communauté réduite aux acquêts : la maison est un bien propre de Colette. La totalité de sa valeur rentre dans l’actif successoral (à partager entre les ayants droit, par exemple les enfants et le conjoint).
  • Communauté universelle : la maison est un bien commun. Avant le traitement de la succession, Jean reçoit sa part de la communauté : la moitié de la maison. L’autre moitié de sa valeur rentre dans l’actif successoral à partager.
  • Séparation de bien : la maison est un bien propre. La totalité de sa valeur rentre dans l’actif successoral à partager.

Une maison achetée après le mariage

Après leur mariage, Colette et Jean ont acheté une maison avec les économies du couple. Colette décède. Selon le régime matrimonial du couple :

  • Communauté réduite aux acquêts : La maison est un bien commun. Avant le traitement de la succession, Jean reçoit sa part de la communauté : la moitié de la maison. L’autre moitié rentre dans l’actif successoral.
  • Communauté universelle : La maison est un bien commun. Avant le traitement de la succession, Jean reçoit sa part de la communauté : la moitié de la maison. L’autre moitié rentre dans l’actif successoral.
  • Séparation de bien : La maison est un bien en indivision. La valeur de la contribution de Colette à l’achat de la maison entre dans l’actif successoral. Jean reste propriétaire de sa part.

Un compte d’épargne constitué après le mariage

Après son mariage avec Jean, Colette a ouvert un compte d’épargne à son nom qu’elle a alimenté sur son salaire. Colette décède. Selon le régime matrimonial du couple :

  • Communauté réduite aux acquêts : Le compte épargne est un bien commun car il a été constitué avec les revenus de la communauté. Avant le traitement de la succession, Jean reçoit sa part : la moitié du compte épargne. L’autre moitié rentre dans l’actif successoral.
  • Communauté universelle : Le compte épargne est un bien commun. La maison est un bien commun. Avant le traitement de la succession, Jean reçoit sa part de la communauté : la moitié du compte épargne. L’autre moitié rentre dans l’actif successoral.
  • Séparation de bien : Le compte épargne est un bien propre. La totalité de sa valeur entre dans l’actif successoral.

Comment aménager le régime matrimonial en fonction de vos objectifs ?

Expert MaSuccession.frPhillipe, expert en ingénierie patrimoniale de MaSuccession.fr vous répond.

Les quelques exemples ci-dessus vous donnent une idée générale de l’impact du régime matrimonial sur l’actif successoral en l’absence d’autres dispositions.

Dans le détail, il peut être compliqué pour vous d’anticiper les conséquences du régime matrimonial sur la transmission d’un bien en particulier.  J’attire votre attention, par exemple, sur le cas de l’assurance vie. La souscription par un des conjoints ou conjointement par les deux, peut avoir des conséquences successorales très différentes pour les conjoints selon leur régime matrimonial.

Dès lors que vous envisagez un investissement important, il est essentiel de penser à ses conséquences successorales.

Il existe de nombreuses possibilités pour aménager le régime matrimonial lors du mariage et après le mariage soit pour avantager le conjoint, soit au contraire pour réduire sa part, par exemple au profit des enfants. Cela peut être fait par des clauses additionnelles au contrat de mariage (clause de préciput, clause d’attribution intégrale, clause de remploi …), par donation, ou par testament.

N’hésitez pas à nous solliciter pour vous aider à choisir parmi ses nombreuses options celles qui correspondent à vos objectifs. Compte tenu des enjeux pour votre famille, du poids et de la complexité croissante de la fiscalité, notre expertise est de plus en plus utile, voire nécessaire, pour optimiser la transmission de votre patrimoine d’un point de vue juridique, fiscal et financier.

 

[i] En l’absence de facture ou de contrat, les biens en indivision sont considérés comme appartement à chaque conjoint par moitié.

[ii] Depuis 1966. Avant 1966, le régime matrimonial par défaut était le régime de la « communauté de meubles et acquêts » qui se distingue du régime de la communauté réduite aux acquêts en cela que les revenus des biens propres sont considérés comme des biens communs.